Selon les époques, le Jura a connu les sommets de la gloire ou des heures sombres. Le tout mené par de grands hommes natifs de cette région riche et inventive. Il a gardé les traces de guerres destructrices et d’alliances ingénieuses et calculées : collégiale de Dole, abbayes, salines , châteaux et vestiges attestent de son passé. Aujourd’hui, il jouit de l’exceptionnelle qualité de ses espaces naturels qui lui permet de s’engager sur la voie d’un tourisme prometteur.

Préhistoire

Des hommes préhistoriques ont vécu dans le Jura, quelques traces, notamment des pierres taillées, ont permis aux archéologues d’identifier une occupation humaine il y a environ 145 000 ans avant JC. Plus tard, au néolithique, il y a 4 000 ans, sur les bords des lacs de Chalain et Clairvaux-les-Lacs, une communauté s’organise peu à peu en villages défensifs élevés sur pilotis. Par la suite, la colonisation du Jura montagneux s’accompagne de la diffusion de nouveaux savoir-faire techniques et le travail des métaux se développe à partir de 900 ans avant JC. Le territoire de l’actuel département du Jura est occupé petit à petit comme le reste de la région par un peuple gaulois les Séquanes.

Espace archéologique à Clairvaux – reconstitution maison lacustres du Néolithique
Espace archéologique à Clairvaux – reconstitution maison lacustres du Néolithique © Jura Tourisme

La Séquanie gallo-romaine

Le territoire entre dans la mouvance de la puissance romaine après la conquête de Jules César en 52 avant JC. La romanisation se fait par l’implantation de domaines agricoles producteurs de céréales et de vins et aussi par l’exploitation du sel : les viandes salées jurassiennes sont connues jusqu’à Rome. Les cultes latins s’ajoutent aux divinités gauloises. La paix romaine s’étend sur la Séquanie comme sur toute la Gaule.

Invasions germaniques et débuts de la christianisation

En 407 après JC, menacés par les Vandales, la Séquanie s’assurera l’aide des Burgondes. La région entre alors dans une période de turbulences politiques. Un métissage des peuples et des cultures s’opère et en même temps la christianisation gagne le Jura. Des saints comme l’ermite Romain et son frère Lupicin fondent des monastères. L’abbé Bernon fonde les abbayes de Gigny, de Baume-les-Messieurs et de Cluny. Un siècle plus tard, les rois francs s’imposent dans toute la Burgondie. Charlemagne y étendra son empire.

Abbaye de Gigny © Jura Tourisme

Abbaye de Gigny © Jura Tourisme

Abbaye de Baume-les-Messieurs © Stéphane Godin/Jura Tourisme

Abbaye de Baume-les-Messieurs © Stéphane Godin/Jura Tourisme

L’apogée médiéval

Terre d’empire ou fief du duché de Bourgogne
Du XIème au XIIIème siècle, les terres jurassiennes furent englobées dans le cadre d’une principauté qui ne cessa de se renforcer : Le comté de Bourgogne. Celui-ci sera rattaché au Saint Empire Romain Germanique lorsque Béatrice, héritière du comté épousera l’empereur Frédéric Barberousse en 1032. Cette période est marquée par le pouvoir des petits seigneurs locaux (la dynastie des Chalon fonde la ville fortifiée de Nozeroy), le défrichement, le peuplement de la chaîne jurassienne, le rayonnement monastique et le développement des villes. Dole accueille le parlement et une université.

Château de Frontenay
Château de Frontenay © Stéphane Godin/Jura Tourisme

Vers l’autonomie

Période autrichienne et espagnole

Cette période faste prend fin à la mort du quatrième comte-duc, Charles le Téméraire (1477) quand Louis XI, roi de France, veut asseoir sa domination sur la Comté. La ville de Dole est incendiée (1479), de nombreux châteaux sont détruits. Son fils Charles VIII, rendra la Comté à l’Autriche en 1493. La région restituée aux Habsbourg forme une principauté autonome sur la marge orientale du royaume de France. Un gouverneur comtois siège à nouveau à Dole. Avec l’avènement de Charles Quint, la province vit son âge d’or. Il lui offre franchises, libertés et privilèges et s’entoure de nombreux diplomates comtois (Chancelier Grandvelle). A sa mort (1558), la province passe à la branche espagnole de la maison d’Autriche.

Collégiale Notre Dame de Dole © Jura Tourisme

De la Renaissance à la Révolution

Les rois de France, Henri IV, puis Louis XIII, ne renonceront pas à l’annexion de la province qui redeviendra un champ de bataille opposant l’Espagne à la France. Claude Prost, dit le capitaine Lacuzon, devient la figure emblématique de cette lutte. La Comté est dévastée. En 1678, le traité de Nimègues donne la Comté à la France et un arc de triomphe (la porte Saint Martin) à Paris est élevé à la gloire de Louis XIV, en mémoire de la conquête de la Franche-Comté. Vauban fortifie Besançon et Salins. L’industrie se développe, l’énergie hydraulique alimente forges et moulins et l’exploitation du sel se mécanise et s’accroît.

La Révolution donne au Jura son identité administrative lors de la création des 3 départements de la Franche-Comté : Haute-Saône, Doubs et Jura (5 février 1790).

De la révolution à nos jours

Sous Napoléon les forges jurassiennes travaillent à plein régime pour armer les troupes. Le chemin de fer a fait son apparition et contribue au développement économique. L’horlogerie se développe. A Morez, la fabrication des clous évolue vers celle des lunettes, tandis qu’à Salins s’implante des faïenceries. Le Jura a son innovateur social, le fouriériste Victor Considérant. En 1879, le département donne à la IIIème République son premier Président : Jules Grévy. Un mouvement social original se développe. Le 1er Syndicat agricole de France est crée en 1884. La Fraternelle est crée à Saint-Claude. La production de fromages et de vins se modernise et s’organise. C’est dans le Jura que naissent les premières coopératives vinicoles françaises au tout début du XXème siècle. La collecte du lait se structure et l’on construit des « chalets  » pour abriter les fruitières qui transforment le lait en fromage. Louis Pasteur, né à Dole en 1822, incarnera les espoirs placés dans la science à cette époque. Il découvrira le vaccin contre la rage et créera l’œnologie moderne.

Salins et Lons-le Saunier deviennent des stations thermales de renom accueillant une clientèle aisée de notables venus « prendre les eaux ».

Les deux guerres mondiales ralentissent cet essor. Le Jura fidèle à sa tradition de terre frontalière devient une terre de résistance. La ligne de démarcation traverse le Jura. Des filières de passage s’organisent en direction de la Suisse. Les maquis se développent. Le 9 avril 1944, à Saint-Claude ont lieu les « Pâques Rouges » une rafle de plus de 340 hommes. Après la guerre, l’industrie renaît et le Jura entre dans une période de prospérité. En 1968, un barrage hydro-électrique est construit sur l’Ain, donnant naissance au lac de Vouglans.

Aujourd’hui, le Département vit principalement de sa forte attraction touristique quatre saisons. Le thermalisme, les activités de sports de pleine nature été et hiver, l’oenotourisme en font un département bien placé sur le plan régional. Mais il fait aussi le pari de l’avenir avec son allié le plus essentiel : la nature.

Maison Pasteur à Arbois - visite interactive © Aline Dalloz/Jura Tourisme

Maison Pasteur à Arbois - visite interactive © Aline Dalloz/Jura Tourisme

Quelques figures historiques marquantes

Philibert de Chalon (1502-1530)

Dernier descendant de la famille de Chalon-Arlay, il est un authentique prince du XVIème siècle. Régnant sur le Comté de Bourgogne et d’autres possessions voisines jusqu’aux Flandres, il fait allégeance à Charles Quint et combat pour l’Espagne. A sa mort, ses biens reviendront à son neveu Guillaume de Nassau dont les descendants sont les actuels souverains des Pays –Bas.

Le Capitaine Lacuzon (1607-1681)

Né à Longchaumois, le valeureux Claude Prost s’illustre pendant la guerre de Dix Ans, initiée par le Cardinal de Richelieu. Elle annonce la guerre de Trente Ans, menée par Louis XIV, pour conquérir la Comté. Lacuzon personnifie la résistance dans la région.

Claude Joseph Rouget de Lisle (1760 – 1836)

Né à Lons-le-Saunier le 10 mai 1760, au 24 de la rue des arcades. En 1792, il est capitaine de l’armée du Rhin à Strasbourg. Quand la guerre est déclarée à l’Autriche, des bataillons de volontaires arrivent dans la ville pour combattre l’Europe des rois. Dans la nuit du 24 avril 1792, il rédige un chant pour donner du cœur au ventre aux soldats de la liberté. A son chant, il donne le nom de chant de guerre de l’armée du Rhin. En juillet 1792, les volontaires du bataillon des Marseillais en font leur chant de marche. Quand ils arrivent à Paris rejoindre l’armée des fédérés, ils le chantent à tue tête. Les Parisiens baptisent alors ce chant la Marseillaise. Ce brillant mélodiste écrit plus de 300 romances qui sont conservées à la bibliothèque de Lons-le-Saunier.

Statue de Rouget de Lisle à Lons-le-Saunier
Statue de Rouget de Lisle à Lons-le-Saunier

Claude Pierre Molard (1759 – 1837)

Natif des Bouchoux, Claude Pierre Molard fut un inventeur de génie et une figure-clé de la technologie au tournant des 18ème et 19ème siècles, membre de l’académie des sciences dont il fut même le président, et professeur à l’Ecole Polytechnique et à l’Ecole Normale Supérieure nouvellement créées par la Révolution.

Il fut le premier directeur du Conservatoire national des arts et métiers (CNAM) de 1800 à 1817, son frère Emmanuel-François lui succédant ensuite. Il y a notamment créé une école de dessin destinée à la construction des machines et de tous les autres travaux industriels.

Attaché à son Jura d’origine, il est toujours resté membre de la Société philosophique des Sciences et Arts utiles de Saint-Claude.

Pierre Bouchard (1771 – 1822), Orgelétain découvreur de la Pierre de Rosette

Pierre François-Xavier Bouchard a découvert la fameuse Pierre de Rosette, avant d’en pressentir l’importance et qu’elle ne soit remise à Champollion et traduite par ses soins en 1822, ouvrant ainsi la porte à la compréhension des hiéroglyphes égyptiens que personne ne savait plus lire depuis quatorze siècles.

Pierre Bouchard est né à Orgelet le 29 avril 1771. En juillet 1799, il va dégager la fameuse « Pierre Noire » couverte d’inscriptions et est d’emblée convaincu de l’importance de sa trouvaille. La Pierre de Rosette ne sera déchiffrée que 23 ans plus tard par Champollion.

Jules Grévy (1807-1891)

Né à Mont-sous-Vaudrey, il devient Président de la Chambre des Députés et de l’Assemblée Nationale puis le quatrième Président de la République française (1879-1887).

Victor Considérant (1808-1893)

Né à Salins-les-Bains, ce polytechnicien rencontre Fourier à Paris et propage ses idées et son modèle de cité ouvrière idéale. Philosophe économiste il défendra en 1848 le droit de vote pour les femmes. Son buste est érigé place des cordeliers à Salins-les-Bains.

Louis Pasteur (1822-1895)

Louis Pasteur naît à Dole le 27 décembre 1822. Scientifique, chimiste et physicien de formation, il deviendra le pionnier de la microbiologie. Il étudiera les fermentations dans sa vigne de Montigny-les-Arsures et mènera des expériences dans l’atmosphère à Arbois et au mont Poupet. Créateur du réseau des Instituts qui portent son nom, il accomplit l’essentiel de son œuvre à Paris mais son cœur reste fidèle au Jura qui en retour est fier de la gloire universelle du père de la vaccination antirabique.

Portrait de Louis Pasteur © Wikipédia

Portrait de Louis Pasteur © Wikipédia

Maison natale de Louis Pasteur © Jura Tourisme

Maison natale de Louis Pasteur © Jura Tourisme

Auguste Pointelin (1839-1933)

Connu comme le peintre du Jura, il naît à Arbois en 1839.Il peint les paysages de la Franche-Comté et obtient de nombreux prix pour sa peinture réaliste. Il sera même soutenu par Pasteur. Ses toiles évoquent la solitude, la méditation et l’intériorité.

Paysage d’Auguste Pointelin (1888)
Paysage d’Auguste Pointelin (1888) © Wikimedia Commons

Léon Bourgeois (1851 – 1925)

Léon Bourgeois est originaire de Foncine-le-Bas, et plus précisément du lieu-dit « la gypserie ». Une plaque familiale en témoigne (ce que ne mentionne pas Wikipédia…).

Il commence dans la vie avocat, mais entre très vite dans l’administration. Après divers postes préfectoraux importants, il achève sa carrière administrative comme préfet de police à Paris. Commence sa carrière proprement politique.

Élu député de la Marne en 1888 sous l’étiquette « radicale » et siégeant avec le groupe « Gauche radicale », il est réélu en 1889, 1893, 1898 et 1902. Il sera surtout ministre de l’Intérieur, de l’Instruction publique et des Beaux-Arts, de la Justice, du Travail, des Affaires étrangères, président du conseil des ministres, président de la Chambre des députés, ministre d’État durant la Grande guerre. Sans ennuis de santé , il serait sans doute devenu président de la République en 1913…

Après la guerre, il devient sénateur et… président du Sénat. Il prépare aussi la création de la Société des Nations dont il devient le premier président, une action internationale couronnée par l’attribution du prix Nobel de la paix le 11 décembre 1920. Seuls dix Français ont eu cet honneur depuis la création de ce Prix en 1901.

Sans doute marqué par la grande culture mutualiste du Jura et de la Franche-Comté, il élabora une doctrine : le solidarisme, synthèse entre le libéralisme et le socialisme. Il proposa d’ailleurs le premier la création de l’impôt général sur le revenu… rejeté par l’assemblée à l’époque.

Marcel Aymé – portrait datant de 1929
Marcel Aymé – portrait datant de 1929 © Wikipédia

Marcel Aymé (1902-1967)

Adopté par une de ses tantes à Dole, il passe son enfance à Villers-Robert chez ses grands-parents. Il deviendra journaliste et écrivain à Paris. Son enfance lui inspirera de nombreux ouvrages où il observe la société avec un regard ironique : la Jument verte, le Passe-Muraille, la Vouivre.a

Paul-Emile Victor (1907-1995)

Né à Genève, il passera toute son enfance à Saint-Claude où son père possédait une usine de pipes puis à Lons-le-Saunier. Ethnologue, scientifique et écrivain il est connu pour avoir été le pionnier des explorations polaires. Aujourd’hui, le centre polaire Paul-Emile Victor (situé à Prémanon) est un musée qui permet de retracer les grandes conquêtes historiques des régions polaires, de découvrir la faune du grand Nord, la géographie polaire, les expéditions modernes et beaucoup d’autres facettes polaires…

Edgar Faure (1908-1988)

Il n’était pas jurassien mais il l’est devenu. Cet avocat, membre du parti radical, devient ministre et Président du Conseil à plusieurs reprises sous la IV et Vème République. Il entrera à l’Académie française en 1978.

Bernard Clavel (1923-2010)

Né à Lons-le-Saunier, il entre en apprentissage chez un pâtissier à Dole. Il pratique de nombreux métiers et commence à peindre et à écrire. Encouragé par Marcel Aymé et Hervé Bazin, il continue d’écrire et publiera plus de 50 livres. Il recevra une vingtaine de prix littéraires dont le Goncourt en 1968 pour les Fruits de l’hiver dont l’histoire se déroule en partie dans le Jura.

Pierre Overnoy (1937-)

Pierre Overnoy est le pionnier historique dans le domaine de l’élaboration des « vins naturels » en France. Dès les années 1950, il considère les premiers herbicides comme nuisibles pour l’environnement alors que beaucoup les considéraient comme une avancée technologique. Il fait souvent référence au biologiste et oenologue Jules Chauvet, le premier à remplacer la chimie par la physique.

Hubert-Félix Thiéfaine né en 1948

Consacré par deux Victoires de la Musique en 2012, cet artiste dolois, auteur-compositeur-interprète, reste fidèle à lui même et continue à jouer des « musiques urbaines » selon ses propres termes.

Bien que très peu présent dans les grands médias, Hubert-Félix Thiéfaine connaît un succès relativement important depuis le début de sa carrière : ses albums sont pratiquement tous consacrés disques d’or et ses concerts font régulièrement le plein grâce à la fidélité et l’attachement de son public. Cette particularité fait de lui une des figures singulières de la chanson française et ses méthodes de promotion poseront les jalons de la nouvelle scène française.